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Le bouquetin des Alpes, ou "Capra Ibex", est une espèce protégée et emblématique des Alpes. Les mâles mesurent entre 75 et 90cm au garot, pèsent entre 65 et 100kg et possèdent ces cornes majestueuses qui atteignent entre 70 et 100cm. Au début de l'hiver, pendant le rut, ils s'affrontent lors de combats impressionnants. Les femelles - les étagnes - mesurent entre 70 et 78cm au garot pour un poids entre 35 et 50kg. Leurs cornes sont beaucoup plus courtes.

Les bouquetins sont présents dans le massif des Bornes / Aravis et il n'est pas rare d'en croiser lors de randonnées autour de Petit Bornand. Le Club "Connaître et Protéger la Nature" - CPN - de Petit Bornand les Glières ne pouvait donc faire autrement que de lui consacrer certaines de ses activités.

Ce fut chose faite avec la rencontre du dimanche 30 mars 2013 autour du film "Les Bouquetins d'Europe" de Pierre Walder. Non seulement il présentait notre Capra Ibex mais également ses cousins d'Espagne, des îles Grecques et du désert du Néguev.

rencontre bouquetin du CPN
  Si vous n'avez pas pu participer à cette rencontre grand public, découvrez - ou redécouvrez - ce superbe animal à travers ce petit documentaire de 5 minutes du photographe animalier Eric Dragesco.
 

Le Bouquetin des Alpes d'Eric Dragesco sur Vimeo.

 

La Brucellose

La brucellose est une maladie bactérienne qui touche actuellement les bouquetins du massif du Bargy. D’origine domestique, elle leur aurait été transmise par un troupeau de bovin du Reposoir en 1999. Les bouquetins auraient servi de « réservoir » à la bactérie durant toutes ces années. Elle peut aussi, dans de rares cas, infecter l’être humain après consommation d’aliments au lait cru, d’où le problème. En effet, notre région est reconnue pour son excellent fromage au lait cru : le Reblochon. Si un vaccin contre la brucellose existe pour les troupeaux, il est interdit car il fausse les résultats d’un test de dépistage basé sur les anticorps, test massivement pratiqué pour éradiquer toute réapparition de la maladie. Vous pouvez en apprendre d'avantage à travers les documents indiqués plus bas.

 
Impact sur l'élevage

Pour les éleveurs/producteurs, les conséquences de la brucellose sont importantes :
  • Si une bête du troupeau est positive au test de dépistage, elle est abattue.
  • Si une bête du troupeau déclare la maladie, c’est tout le troupeau qui est abattu et les troupeaux ayant été en contact avec ce troupeau sont mis en quarantaine pendant 70 jours.
  • Quand un troupeau est touché, toute la production de fromage est détruite.
  • Il y a un risque important sur les ventes si les consommateurs n'ont plus confiance.

Du coup, les éleveurs, ainsi que nombres de personnalités politiques, au vu des risques économiques et sanitaires, demandent l’abattage total de la population de bouquetin du Bargy, abattage qui serait suivi d’une réintroduction d’éléments sains.
 
  Etagne controlée lors de la campagne de test
Photo Vincent Mugnier-Merlin
Actions entreprises

Une campagne de test  a été effectuée sur les bouquetins du Bargy en 2012 et 2013. Les animaux ont été anesthésiés afin d'effectuer des prélèvements puis ils ont été marqués et équipés de colliers, comme l'étagne ci-contre.

De cette étude, il en a été déduit que que 40% du troupeau était touché, ratio qui irait à plus de 70% chez les femelles de plus de 5 ans.

Le préfet de Haute-Savoie a décidé, contre l'avis du CNPN, de faire abattre en automne 2013 plus de 220 bouquetins agés de plus de 5 ans qui se sont ajoutés à la trentaine déjà abattus car contrôlés positifs lors de la campagne de test.
   
Plaidoyer pour les bouquetins

Mais certains avancent des arguments qui sont loin de plaider en faveur de ces solutions :
  • Nombres d’experts scientifiques estiment que le risque de transmission de la maladie du bouquetin au troupeau domestique est minime. D’ailleurs pendant dix ans, il y a eu cohabitation étroite avec les troupeaux ovins et caprins sans que ces derniers soient touchés par la maladie.
  • Les experts scientifiques préconisent, dans le pire des cas, d’abattre seulement les éléments testés positifs.
  • Les bouquetins sont une espèce protégée.
  • Le test de dépistage est remis également en cause car il empêche la vaccination, seul moyen réellement efficace contre la maladie.
  • Il est illusoire d'envisager d'abattre la totalité de la population de bouquetins du massif du Bargy : il y aura toujours des individus qui échapperont aux battus.
  • Un abattage massif risque également de provoquer la fuite des animaux vers d’autres massif, de disséminer la maladie et reviendrait à abattre 60% d'animaux parfaitement sains.
  • Aucun test n’a été pratiqué sur les 220 bouquetins abattus dans l’automne 2013, il n’y a donc aucun moyen de savoir précisément la propagation de la maladie dans la population de bouquetin.
  • D’une manière générale, les mesures prises empêchent, de fait, toute étude scientifique visant à mieux connaître cette maladie et son mode de transmission, nous privent des connaissances permettant d'avoir une meilleure réponse en cas de nouvelle épidémie et accroissent finalement les risques futurs tant pour les populations d'animaux sauvages que pour les troupeaux domestiques.
 
Situation à l'automne 2014

Les tests pratiqués durant le printemps 2014 ont révélé que l'épidémie avait progressé chez les bouquetins de moins de 5 ans. Ceci est dû au fait que les vieux mâles ayant été abattus sans distinction, les jeunes ont eu accès au rut et ont été contaminés par des femelles porteuses de la bactérie.

Pour les uns, c'est la preuve que l'abattage partiel ne suffit pas et qu'il faut procéder à l'abattage total, pour les autres c'est la preuve qu'il ne fallait abattre que les bouquetins positifs comme préconisé par le CNPN et que le choix de l'abattage sans distinction des plus de 5 ans n'a fait qu'empirer les choses.

Le 06 septembre 2014, Ségolène Royale de passage en Haute-Savoie s'est déclarée pour l'assainissement du Bargy : "Je souhaite protéger la qualité des productions du terroir donc il faut assainir le massif et nous prendrons les mesures qui s’imposent et que dans un second temps, la réintroduction du bouquetin se fasse sur un territoire assaini." Pour tout le monde, il est clair qu'elle est en faveur de l'abattage total de la population de bouquetin du Bargy.

Les opérations d'abattage des bouquetins de plus de 5 ans auraient du reprendre le 22 septembre mais la présence d'observateurs des associations de protection de la nature sur le massif du Bargy a forcé les autorités à annuler l'opération.

Il faut dire que les moyens techniques à disposition ont également évolué : un test in-situ de dépistage de la brucellose est désormais disponible et permet de contrôler plus rapidement si un bouquetin est sain ou non. De plus les associations de protection de la nature demandent qu'un vaccin - déjà disponible pour les petits ruminants domestiques - soit testé sur les bouquetins du massif. Ces associations continuent de penser qu'il est possible de faire cohabiter les bouquetins et le pastoralisme.

A ce jour, l'objectif des autorités semble toujours être l'abattage total de la population de bouquetins du Bargy suivi d'une réintroduction après un certain délai.
 
Situation à l'automne 2015

Les tests pratiqués durant le printemps 2015 ont révélé qu'un peu  plus de 40% de la population de bouquetin était infectée... et qu'il y a donc près de 60% de bouquetins sains. Malgré ce risque de la brucellose, tout l'été, les troupeaux de chèvres et de moutons ont été autorisé à paturer sans aucun problème.

Cela n'a rien d'étonnant puisque L'ANSES - agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail - estime, dans son rapport d'expertise sur la brucellose chez les bouquetins du Bargy publié en juillet 2015, que les bouquetins du Bargy ne représentent pas un danger significatif pour la santé publique : le risque actuel de transmission de la brucellose aux cheptels domestiques est estimé à un niveau « quasi-nul » à « minime ». Les experts estiment le risque actuel pour l’homme comme « quasi-nul ». Voici en résumé ce qu'ils indiquaient de plus :
  • La situation du Bargy est particulière et permettrait un apprentissage permettant de mieux comprendre et expliquer le phénomène.
  • Les abattages massifs précédents n'ont pas réduits la séroprévalence dans la population de bouquetin, au contraire, les jeunes sont plus touchés depuis.
  • Seule une gestion du problème sur plusieurs années semble réellement efficace.
  • La vaccination, qui est désormais envisageable suite aux progrès fait dans ce domaine, est nécessaire en complément des mesures sanitaires et du maintien d'une surveillance.
  • Les experts ont étudié 4 scénarios :
    1. Suivi sans abattage de la population de bouquetin avec en option biosécurité et/ou vaccination
    2. Capture avec euthanasie sélective des bouquetins séropositifs avec en option biosécurité et/ou vaccination
    3. Euthanasie sélective des bouquetins séropositifs et marquage des séronégatifs lors d’opérations de capture, suivis d’un abattage de masse, en fin de saison
    4. Abattage de masse indiscriminé
    Encore une fois, rien n'est simple. Les abattages de masses laisseraient sur place un grand nombre de cadavres difficiles à collecter et risquent fortement d'étendre l'infection au massif des Aravis suite à la fuite de bouquetins. Concernant ce dernier risque, il existe aussi avec le premier scénario. Les experts semblaient préconiser le scénario 2, avec des variantes possibles.

    La biosécurité, quant à elle, vise à réduire la transmission de la maladie vers les cheptels domestiques en évitant les points d'agrégation que représentent les pierres à sel, en évitant la mixité troupeau domestique / bouquetins, en privilégiant la création de zone refuges de la faune sauvage comme cela avait été le cas lors de l'épidémie de pietin ou encore, de mieux gérer les rotations de pâtures lors de la première mise à l'herbe.

Le jeudi 8 octobre 2015, le préfet de Haute-Savoie - Georges-François Leclerc - a lancé l'opération d'abattage des bouquetins : il est prévu de conserver 60 à 70 bouquetins identifiés sains et bagués tandis près de 230 autres animaux devraient être abattus sans test préliminaire, qu'ils soient positifs ou sains. Tout le massif du Bargy a été bouclé par les gendarmes. L'arrêté pris courant septembre a donc été mis en application sans attendre le résultat du recours légal déposé. Voir à ce sujet la position des associations environementales.

Il n'y a plus qu'à espérer que cette opération ait l'effet souhaité et que, malgré les risques annoncés, elle soit couronnée de succès en éradiquant la brucellose du massif du Bargy, objectif qui, rappelons le, est poursuivi par tous.
 
Pour en savoir plus

Vous pouvez consulter le bulletin épidémiologique n°60 ainsi que le rapport d'expertise sur la brucellose chez les bouquetins du Bargy de l'ANSES, la synthèse de Jean-Marie Gourreau, vétérinaire épidémiologiste et vice-président de la commission faune du CNPN, le dossier de Matthieu Stelvio.
 
Comment agir ?

Même s'il n'est plus possible d'enrayer l'abattage massif des bouquetins du Bargy, vous pouvez continuer signer la pétition si vous le souhaitez.
 

sauvons les bouquetins


Mais surtout, ne cessez pas de manger de ces délicieux Reblochons … sinon, les bouquetins auront vraiment été abattus pour rien.

Dernière mise à jour : 08/10/2015

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